
Avec Aux jours qui viennent, ce premier long métrage à la fois intime et tendu, Nathalie Najem impose une voix singulière dans le paysage du cinéma français. Un regard sans concession sur l’emprise psychologique, la violence insidieuse, mais aussi sur les liens, la solidarité, les zones de lumière. Une œuvre forte, marquée par la justesse du jeu, une mise en scène organique et une volonté constante de raconter sans juger.
Scénariste chevronnée, Nathalie Najem accompagne depuis plusieurs années les jeunes cinéastes émergents dans le cadre du dispositif La première des marches porté par l’Acap. Elle signe ici un film personnel et engagé, qui confirme à quel point son exigence artistique s’enracine dans une attention profonde aux personnages, à leurs contradictions, à leur humanité.
Un récit à la lisière du thriller, une mise en scène tout en tension
Au cœur du récit : Joachim, un homme en perte d’équilibre, incarné avec intensité par Bastien Bouillon. Il fascine, inquiète, blesse. Face à lui, deux femmes que tout oppose ou presque : Laura, son ex-compagne (Zita Hanrot), et Shirine, sa nouvelle relation (Alexia Chardard), bientôt unies par une même expérience de l’emprise. Ce triangle narratif, tendu à l’extrême, devient l’espace d’un film vibrant où s’entrelacent mémoire, danger, courage et sororité.
Sans jamais sombrer dans le manichéisme, Nathalie Najem creuse la complexité des personnages. Joachim n’est pas un « méchant » en soi ; il est fragile, parfois lumineux, souvent déroutant, mais ses actes restent inacceptables. Le film fait de ce trouble une matière vive, refusant les caricatures et préférant aux discours l’ambivalence des sentiments.

Un tournage sous haute intensité
Cette tension narrative, la réalisatrice la traduit aussi dans le geste de mise en scène. Tournage en extérieurs, scènes de confrontation physique, peu de répétitions, caméra au cœur de l’action : « Je veux être dans la vraie vie, dans quelque chose de frais, même dans des conditions très physiques. Mais toujours dans la délicatesse », explique-t-elle. Le film s’est construit dans ce rapport organique au tournage : « Pour moi, c’est une forme d’écriture en soi. Il m’est même arrivé de refaire une scène le lendemain, après une nuit de réflexion. »
Alexia Chardard, impressionnante dans le rôle de Shirine, a réalisé elle-même ses cascades. « Elle s’est engagée à 100 %, dans son corps, dans son regard. » Comme dans Baby Love, son précédent moyen métrage, Nathalie Najem cherche à faire tomber les masques, à révéler l’humain dans ses zones d’ombre comme de lumière. Une quête de vérité qui repose sur une grande confiance entre elle et ses comédiens : « Je ne les pousse jamais dans leurs retranchements malgré eux. Je travaille avec douceur, mais je veux aller loin. »
Un film mûri, habité par l’expérience
L’écriture du film a pris du temps. Très longuement retravaillé, le scénario a cheminé entre commandes d’écriture pour d’autres et remaniements successifs. « Chaque fois, on me demandait de revoir la structure. C’était éprouvant. » Le déclic est venu avec l’engagement de Canal+, qui a permis de débloquer la production.
Entre thriller psychologique et drame intime, le film s’autorise des scènes de tension extrême, sans jamais perdre de vue la complexité des situations. Une signature déjà perceptible dans Baby Love, le moyen métrage remarqué de la réalisatrice, et qui se confirme ici avec plus d’ampleur encore.
Porté par un trio d’interprètes d’une grande justesse, ce premier long métrage donne à voir ce qui reste souvent indicible. Et à ressentir ce que l’on croyait lointain.
Sortie en salle le 23 juillet 2025
Crédits photos © Paname Distribution