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UN SPÉCIMEN EN VOGUE

Devenue tradition dans vos salles de cinéma, les soirées du 31 octobre et du 1er novembre sont souvent consacrées au cinéma d’horreur, d’épouvante voire fantastique ou de science-fiction. Le film dit de genre a le vent en poupe dans les salles françaises. Mais c’est quoi un film de genre ? Souvent opposé au cinéma d’auteur, le genre est poreux. Il n’a pas de cadre…

Qu’il soit d’horreur, fantastique, voire western, on connait tous de nombreux monstres sacrés du cinéma de genre : John Ford, Jacques Tourneur, David Cronenberg, Tim Burton, Quentin Tarantino, Gaspar Noé et tant d’autres… Selon les époques et le niveau de reconnaissance des scénaristes, certains des films les plus célèbres aujourd’hui, furent abordés à l’époque comme de simples divertissements de « mauvais genre » en opposition au cinéma dit d’auteur.

L’histoire se répète et des films d’actualité manquent encore de reconnaissance critique en France. Le genre n’est pas très apprécié au pays de Georges Mélies, premier réalisateur de fantastiques du monde ! Ces dernières années pourtant, on observe un changement. Les réalisateurs de films de genre bénéficient de soutiens collaboratifs ou ciblés via le CNC, de résidences d’écriture (SOFILM ou Canal+), mais aussi de la diversification des modes de production (plateformes) qui porte aujourd’hui ses fruits et inverse la tendance. On voit ainsi émerger une nouvelle vague de jeunes réalisateurs audacieux. La nuée, par exemple, un beau spécimen du genre ! Pour sauver sa ferme de la faillite, une mère de famille célibataire se lance dans un élevage de sauterelles comestibles et développe avec elles un lien plus qu’étrange et obsessionnel. La nuée débute comme un drame social rural – on pense à Petit paysan – mais il glisse rapidement dans une sombre angoisse, vers un délitement de la raison, tête baissée vers le fléau. Couleurs, lumières, musique et habillage sonore nous font monter en tension, suées froides assurées ; du cinéma bigger than life.

La critique sociale reste acerbe et c’est là un aspect caractéristique du cinéma de genre. Sous couvert de divertissement, il passe souvent les messages les plus radicaux : les zombis chez Romero, le body horror version technologique chez Cronenberg… « Le « genre » est une grammaire au même titre que le drame ou la comédie. » déclarait en 2017, la réalisatrice Julia Ducournau du mordant Grave. En 2018, Coralie Fargeat sort le sanglant Revenge – ça décoiffe aussi – premier long métrage, de type « rape & revenge » un sous genre, mais aussi Quatre histoires fantastiques de William Laboury, Maël le Mée, Just Philippot, Ghostland de Pascal Laugier, et le glaçant Furie d’Olivier Abbou tourné en région Hauts-de-France.

Dans toute cette diversité, ces réalisateurs savent jouer la carte de la porosité du fameux « mélange des genres ». Et finalement ce qui définirait peut-être le mieux ce qu’est un film de genre, c’est un terrain d’expérimentations très libres !

Pour aller plus loin dans les ténèbres :

  • La nuée, un film label Semaine de la Critique du Festival de Cannes 2020.
  • Dans le genre noir, sous genre « Paris poisseux », Médecin de nuit de Elie Wajeman.
  • Dr. Jekyll et Sister Hyde de Roy Ward Baker (1971).
  • Et pourquoi pas le « genre perso du genre » avec Mandibules de Quentin Dupieux.
  • Et pour les indiscrétions sur le genre en région : Tout fout le camp de Sebastien Betbeder.
  • Pour ne jamais être en manque, on ne vous conseillera jamais assez de participer à L’Étrange Festival. Depuis 1993, cette manifestation a lieu tous les ans au Forum des images à Paris, durant la première quinzaine de septembre.

Crédit photo couverture : La Nuée © Capricci